MEDITATIONS

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27 juillet 


AMBROISE-MARIE CARRÉ



CROIRE ET COMPRENDRE


Marie eut une foi très vive, une perception aiguë au plan mystique ; mais humainement, il est probable que sa connaissance devait être moins claire que nous ne l’imaginons. On ne se trompe pas en affirmant qu’il y eut chez elle un décalage entre "croire" et "comprendre". Il lui fut demandé de croire infiniment plus qu’elle n’a compris, même si elle comprit beaucoup de choses, sous l’action de l’Esprit Saint qui dut l’illuminer, afin qu’elle participe par son intelligence et par son cœur aux mystères dans lesquels elle pénétrait. Si Marie avait tout compris, elle n’eût pas interrogé comme elle le fit. Or elle interroge l’Ange, elle interroge son Fils, et lorsqu’elle retrouve celui-ci au temple, saint Luc n’hésite pas à noter qu’elle ne comprit pas ce que Jésus lui répondait.


Évidemment le décalage entre croire et comprendre a dû se réduire pendant les longues années mystérieuses de Nazareth, les années obscures de Jésus. Il y a des chrétiens et des chrétiennes qui, en songeant à ces trente années, "s’ennuient pour Jésus et pour sa Mère" disait Bossuet, avec un humour dont l’évêque de Meaux n’était pas prodigue. Ces chrétiens ne songent pas à la longue transformation du cœur et de la conscience de la Vierge par le Christ. Quelles paroles furent alors prononcées ? Sans doute Marie entra-t-elle progressivement dans la compréhension profonde de l’œuvre du Saint-Esprit.


Elle y entra progressivement jusqu’à Cana, cet instant où tant de choses se sont éclairées, la Vierge demandant à son Fils un miracle, en sachant très bien ce qui allait se produire. Long cheminement de la Vierge Marie auprès du Christ, jusqu’au Calvaire et à la Résurrection ! Long, très long itinéraire de lumière, de l’Annonciation à la Pentecôte ! Laissez-moi tout résumer dans cette formule : la Vierge Mère a vécu sa vocation prodigieuse dans une lucidité progressive. Il lui fut donné de croire et puis, à force de fidélité, elle finit par comprendre, jusqu’au jour où sa foi disparut dans la vision où l’introduisit sa bienheureuse Assomption.


Mais la manière dont nous vivons notre vocation humaine, nous, pauvres pécheurs, ne ressemble-t-elle pas à celle-là ? Les mots que je viens de prononcer n’éveillent-ils rien en vous ? Une lumière progressive à la mesure où l’on est fidèle, et à partir de consentements que l’on donne sans bien savoir ce qui arrivera, Oui, telle est bien la manière dont nous vivons nos vocations humaines : selon les lois de l’expérience, dans une lucidité qui progresse à la mesure de nos fidélités.



La maternité spirituelle de Marie. VIIIe Congrès marial de Lisieux. p. 160 à 161.