MEDITATIONS

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BASILE DE SÉLEUCIE


LE BON PASTEUR


C’est un plaisant spectacle qu’un berger gardant son troupeau de brebis sur les monts. Au son de la flûte, il avait fait sortir ses bêtes pour les conduire à la pâture et les voici maintenant tout à la fois tenues sous le charme de l’instrument et protégées contre les attaques des bêtes sauvages par le bâton et les armes que le berger a pris soin d’emporter.

Tel est bien ce grand Berger du peuple chrétien. Regardons notre Pasteur, le Christ. Voyons son savoir-faire plein d’humanité et de tendresse, sa douceur envers ses brebis. Il se réjouit de celles qui sont présentes et va chercher aussi celles qui s’égarent. Montagnes et forêts ne lui font pas peur; il parcourt les ravins pour arriver jusqu’à la brebis perdue. Même s’il la trouve en piteux état, il ne se met pas en colère; mais touché de compassion, il la prend sur ses épaules et, de sa propre fatigue, guérit la brebis fatiguée. Certes, il ne se soucie pas de sa fatigue, car avoir retrouvé son bien, le paie amplement de sa peine. "Qui d’entre vous, dit-il, s’il a cent brebis et s’il en perd une, ne laisse les quatre-vingt-dix-neuf autres pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il l’ait retrouvée".

C’est donc avec raison que le Christ proclame: "Je suis le Bon Pasteur, je cherche la brebis perdue, je ramène celle qui est égarée, je panse celle qui est blessée, je guéris celle qui est malade". J’ai vu le troupeau des hommes accablé par la maladie; j’ai vu mes petites brebis fréquenter l’auberge des démons; j’ai vu mon troupeau dépecé par les loups. J’ai vu cela et je n’ai pas regardé de haut. Aussi ai-je pris la main qui se desséchait, tenue par le mal comme par un loup; j’ai délié ceux que la fièvre avait liés; j’ai appris à voir à celui dont les yeux étaient clos depuis le sein de sa mère; j’ai retiré Lazare du tombeau où il gisait depuis quatre jours. Car "Je suis le bon Berger". Non pas un berger qui convoite les brebis, comme les pharisiens; non pas un berger qui cherche à tirer profit des peines de son troupeau; non pas un berger qui s’afflige lorsqu’il voit les brebis soulagées de leurs maux et pleure quand il les aperçoit guéries de leurs maladies: le mort ressuscite et les pharisiens en sont peinés; le paralytique est guéri et les scribes se lamentent; l’aveugle retrouve la vue et un petit cercle s’indigne. Ô pasteurs qui faites les fiers sur la misère du troupeau! Vous faites vos délices des peines de vos bêtes.

Mais moi, "Je suis le bon Pasteur. Le bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis". Pilate a connu ce pasteur, les juifs ont connu ce pasteur mis en croix pour son troupeau; le chœur des prophètes a connu ce pasteur, lorsque, bien avant la Passion, il annonçait l’atrocité à venir: "Comme une brebis, le voici conduit à la boucherie; agneau muet devant les tondeurs, il n’a pas ouvert la bouche". Comme une brebis, le Pasteur a offert sa gorge pour ses brebis. Car sa passion était nécessaire. Il expie notre malheur par son malheur, il remédie à la mort par sa mort. Par son tombeau, il vide les tombeaux, il ébranle le sol de l’enfer, en fait sauter les verrous. La mort porte fièrement sa couronne, tant que le Christ ne reçoit pas la mort. Les tombeaux sont lourds et la prison fermée, tant que le Pasteur, descendu de la croix, ne vient pas apporter à ses brebis enfermées la joyeuse nouvelle de leur libération. On le voit aux enfers où il donne l’ordre d’élargissement; il appelle à nouveau ses brebis, des enfers, il les convoque à la vie.

"Le bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis". C’est ainsi qu’il se propose de gagner l’affection de ses brebis. Aime le Christ qui sait entendre sa voix.


Oratio 26. PG 44 (lat), 129 s.